Parmi les principales voies de recherche contre le vieillissement et les maladies liées à l’âge, il y a celle de la protection de notre ADN, de nos télomères et de nos protéines, mais aussi celle de l’éradication de ces cellules sénescentes ou nuisibles. L’évaluation des médicaments sénolytiques qui ciblent cette dernière voie révèle peu à peu leur impact sur toute une gamme de maladies liées à l’âge. C’est le cas de cette étude de l'Université du Texas à San Antonio qui teste un traitement sénolytique ici contre la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI), une maladie chronique, irréversible et évolutive qui entraîne une cicatrisation des poumons. Les conclusions, plutôt positives, présentées dans la revue EBioMedicine viennent ajouter aux promesses de cette toute nouvelle voie thérapeutique.
Il a été démontré que la sénescence cellulaire était à l’origine de nombreuses maladies liées à l’âge. Ces nouveaux médicaments, les sénolytiques ciblent ce processus dans lequel les cellules endommagées, au lieu de mourir, persistent et deviennent toxiques pour les cellules qui les entourent. Ces nouvelles données laissent espérer qu’un traitement par sénolytique ait la capacité de prévenir ou retarder, à lui-seul et simultanément tout un ensemble de maladies chroniques.
Les chercheurs de l'UT Health en collaboration avec la Mayo Clinic et la Wake Forest School of Medicine rappellent que la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est une maladie mortelle pour laquelle il y a peu d'options de traitement. « C’est une maladie pulmonaire fibreuse progressive et dévastatrice avec une survie médiane de moins de 5 ans chez les adultes récemment diagnostiqués et généralement âgés de plus de 60 ans » rappelle ainsi l’auteur principal, le Dr Anoop M. Nambiar, professeur de médecine à l'UT Health.
L’équipe a recruté 14 adultes âgés diagnostiqués avec une FPI stable, légère à modérée et ciblé de manière thérapeutique une caractéristique biologique fondamentale du vieillissement, impliquée dans la FPI. L’essai apporte des résultats précoces mais prometteurs pour la première fois chez des patients humains : chaque participant a reçu deux médicaments sénolytiques, le dasatinib et la quercétine (DQ), administrés par voie orale pendant 3 jours consécutifs chaque semaine pendant 3 semaines consécutives- soit 9 doses au total. Tous les patients ont observé le traitement. L’équipe a pratiqué des analyses avant et après le traitement et renseigné par questionnaires les symptômes, les résultats de santé, la qualité de vie et les effets indésirables, les marqueurs de la fonction physique, notamment la distance de marche sur 6 minutes, la vitesse de marche, le nombre de passages possibles de position assise à debout, l’indice de fragilité et effectué des dosages biologiques de protéines associées à la sénescence sécrétées par les cellules toxiques.
Les améliorations les plus marquantes, consécutives au traitement sénolytique sont observées dans la mobilité des participants. Ainsi, les performances au test de marche, au test assis-debout et d’autres mesures de la mobilité sont considérablement améliorées après la fin du traitement ;
- la majorité des patients présentent des gains de mobilité supérieurs à 5% ;
- cependant d’autres marqueurs de la fonction physique, dont la force de préhension et la fonction pulmonaire ne sont pas modifiés.
Alors qu’aucun traitement médicamenteux- dont les anti-fibrotiques disponibles- ne s'est jamais montré capable de stabiliser, et encore moins d'améliorer, la distance de marche d'un patient atteint de FPI, ces résultats indiquent un changement de paradigme majeur dans la stratégie de traitement. Il s’agit maintenant de valider ce constat vs témoins et sur un échantillon plus large. Cependant, ces premiers résultats justifient déjà ces essais contrôlés randomisés plus importants.
La sénescence cellulaire, une piste majeure de recherche dans le vieillissement : jusque-là il n’existait aucune donnée publiée démontrant que des médicaments ciblant la sénescence cellulaire puissent être administrés en toute sécurité à des patients plus âgés, ou qu'ils pourraient être utilisés pour traiter des maladies associées à l’âge. Cette étude pilote est préliminaire mais encourageante. Plus précisément alors que le dasatinib et la quercétine sont approuvés par l’Agence américaine FDA des États-Unis pour d’autres indications, ces 2 médicaments s’avèrent également efficaces à éliminer les cellules sénescentes de différents types cellulaires. Enfin, une étude précédente a suggéré que la même combinaison pouvait réduire chez l’animal les symptômes de la maladie d’Alzheimer…
Enfin, les effets secondaires (symptômes respiratoires tels que toux et essoufflement, inconfort gastro-intestinal ou brûlures d'estomac) n'ont pas été de nature à interrompre le traitement.
Bref, des résultats prometteurs pour ces sénolytiques.
Source: EBioMedicine Jan 2018 DOI: 10.1016/j.ebiom.2018.12.052 Senolytics in idiopathic pulmonary fibrosis: Results from a first-in-human, open-label, pilot study
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