Au fil des recherches on comprend mieux toute l’importance du microbiome intestinal dans la santé métabolique, mais aussi la santé globale voire cérébrale ou cognitive avec les dernières données publiées sur l’axe intestin-cerveau. Parvenir à comprendre la dynamique de ces communautés bactériennes et à modéliser leurs interactions est le prochain défi de la science du microbiote. Défi relevé par ces physiciens de l'Université de Californie – Santa Barbara (UCSB) qui nous présentent dans les Actes de l’Académie des sciences américaine de nouvelles approches ou modèles mathématiques pour analyser ces interactions entre les bactéries intestinales. A la clé, une bonne part de notre forme physique ou « host fitness ».
Le microbiome intestinal ou l’univers des microbes qui habitent le tractus intestinal humain suscite de plus en plus l’intérêt des scientifiques et des cliniciens pour son rôle essentiel dans la santé. Cependant, si l’on cite déjà de « bonnes » et de « mauvaises » bactéries, il reste concrètement à déterminer plus précisément lesquels de ces microbes sont responsables de notre bien-être.
Chez la mouche des fruits : ces physiciens à l'Université de Santa Barbara ont développé cette approche mathématique pour analyser et modéliser les interactions entre les bactéries intestinales. Ici chez les mouches des fruits. C’est un début mais leurs travaux constituent une première étape pour mieux cerner ces interactions complexes entre les microbes intestinaux humains. On sait aujourd’hui que le microbiome interagit avec le reste du corps, avec le système immunitaire et même le cerveau et que de nombreuses maladies sont associées à certaines compositions microbiennes dans l'intestin. Cependant, le premier défi est la diversité du microbiome humain pour pouvoir en faire une analyse exhaustive. L’équipe de recherche a donc choisi d’utiliser la mouche des fruits comme modèle pour expliquer comment la présence de certaines bactéries intestinales pouvait avoir des effets physiques et comportementaux sur l’hôte.
On commence par 5 familles bactériennes : précisément, les scientifiques ont examiné les interactions entre les 5 espèces de bactéries de base présentes dans le tube digestif de la mouche et ont calculé comment la présence ou l'absence de certaines espèces influe sur certains aspects de la forme de la mouche, sa durée de vie, sa fertilité et son développement. Ces travaux montrent que les effets d'une espèce en particulier dépendent du contexte dans lequel d'autres espèces sont également présentes. C’est la seconde difficulté.
Durée de vie et fécondité, faut-il choisir ? S'appuyant alors sur de précédentes recherches suggérant que la présence versus l'absence de bactéries affecte la longévité d'un organisme, les chercheurs révèlent que la situation est beaucoup plus nuancée. Ainsi, la présence de certaines bactéries peut augmenter la fécondité de l'hôte, tandis que d'autres peuvent réduire sa durée de vie. Et en examinant l'ensemble de la forme physique d'une mouche, les auteurs montrent qu’il existe une sorte de compromis entre une durée de vie plus courte avec une progéniture abondante et une durée de vie plus longue mais moins de reproduction. Alors, faudrait-il choisir ? En réalité, ce compromis apparaît justement médié par les interactions du microbiome.
Un premier modèle mathématique : Sur 32 lots de mouches habitées chacune par une combinaison unique des cinq bactéries, les chercheurs obtiennent pour chaque combinaison bactérienne, un modèle de développement, de fécondité et de longévité de la mouche. Ils reconnaissent alors qu'un modèle strictement basé sur la présence ou à l'absence d'espèces en particulier ne permet pas de prédire tous les traits observés de la mouche.
En synthèse, l'influence du microbiome sur l'hôte « est plus que la somme de ses parties ». Il va donc falloir développer encore ces modèles pour mieux comprendre les interactions de milliers d'espèces de bactéries différentes dans le microbiome humain et la route sera longue avant de pouvoir vraiment de comprendre la dynamique de ces systèmes.
Source: PNAS December 3, 2018 DOI : 10.1073/pnas.1809349115 Microbiome interactions shape host fitness
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