Cet article d’opinion d’experts du King’s College London, publié dans le British Medical Journal, dénonce la « pollution sonore » dans les hôpitaux comme un problème croissant et un frein à la bonne récupération des patients. Les niveaux d’exposition sonore dépassent régulièrement les recommandations internationales et, « même dans les unités de soins intensifs, qui prennent en charge les patients les plus vulnérables, il n’est pas rare de subir des niveaux de bruit supérieurs à 100 dB, équivalant à de la musique forte avec des écouteurs ».
L’auteur principal, le Dr Andreas Xyrichis, rappelle que le bruit dans les hôpitaux a déjà été documenté comme une entrave à la communication entre les personnels, une source d’erreurs, de stress, d'irritation et de fatigue chez les médecins et les soignants, avec pour conséquence un impact négatif sur la qualité et la sécurité des soins. Les niveaux sonores élevés et le stress induit par le bruit ont des effets négatifs sur les performances et le bien-être du personnel, peuvent contribuer à l'épuisement professionnel, mais pas seulement.
Le vécu des patients est pour la première fois également pris en compte, et l’équipe souligne que le bruit ambiant affecte également la capacité des patients à se reposer, à guérir et à récupérer. Chez le patient, l’exposition au bruit est en effet liée « au développement de la psychose, en particulier en USI, à l’augmentation du stress induit par l'hospitalisation, à une sensibilité accrue à la douleur, à l'hypertension, voire à l’apparition de problèmes de santé mentale.
Le sommeil, une clé de la récupération : les bruits hospitaliers ont bien évidemment des conséquences perturbatrices sur le sommeil et les bruits techniques, de chariots en particulier, ont un effet négatif plus important sur l'éveil que les voix humaines. La récupération après l'hospitalisation est également compromise. Ainsi, chez les patients traités pendant des périodes bruyantes, l’incidence de réhospitalisation est plus élevée que chez les patients traités dans un environnement hospitalier plus calme.
Les patients témoignent : ils rapportent -selon les auteurs, eux-mêmes hospitaliers- que le bruit de l'hôpital peut avoir un effet cumulatif sur leur expérience à l'hôpital. Les patients hospitalisés pendant plusieurs nuits se sentent piégés et stressés, ce qui favorise les demandes de sortie prématurée de l'hôpital et un risque accru de traumatisme et de réadmission.
Des mesures urgentes à prendre :
- Des méthodes justes d’évaluation des niveaux sonores, alors que le bruit est souvent associé de manière incorrecte à des niveaux de pression acoustique élevés. Les dérivations par exemple, peuvent enregistrer des niveaux de pression acoustique faibles alors que l’environnement de sin est réellement bruyant. Réduire les sources de bruit dans les hôpitaux : alarmes, téléviseurs, chariots, téléphones à sonnerie, conversations des personnels, des visiteurs et des patients. Mais attention, certains bruits sont aussi vécus comme positifs, comme le bruit du service de restauration ou la sonnerie d’un mobile en situation d’isolement. Il importe donc de revoir aussi les différentes formes de perception du bruit par les patients.
- Mieux informer les patients et les familles sur les niveaux de bruit probables lors des admissions. Mais l’éducation du personnel est également nécessaire pour encourager une culture qui considère la réduction du bruit comme faisant partie intégrante de soins de santé sûrs et de qualité.
- Fournir si besoin des bouchons d'oreille, installer des panneaux de traitement acoustique, et mettre en œuvre des initiatives éducatives et des protocoles de réduction du bruit.
Jusqu'à présent, les patients étaient considérés comme des victimes passives du bruit de l'hôpital plutôt que des participants actifs à sa réduction. Il est essentiel que les solutions futures insistent sur la participation des patients.
Source: BMJ 19 November 2018 doi: 10.1136/bmj.k4808 Noise pollution in hospitals
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