Si cette étude ne remet pas en question les effets positifs et l’efficacité du cannabis contre certains symptômes et dans de multiples conditions, elle met certainement en garde contre l'impact négatif sur le cerveau d’une exposition prolongée aux cannabinoïdes. L’objectif de cette équipe de l’Instituto de Medicina Molecular (Lisbonne) est ici, dans le Journal of Neurochemistry, de comprendre ces mécanismes afin, en fin de compte, de trouver le moyen d’atténuer le risque d'effets secondaires négatifs, pour les usagers de cannabis récréatif et les patients qui l’utilisent pour lutter contre l'épilepsie, la sclérose en plaques et la douleur chronique.
L’étude menée par Ana Sebastião, chef de groupe à l'Instituto de Medicina Molecular et professeur de à l'Université de Lisbonne et son équipe, en collaboration avec des chercheurs de l'Université de Lancaster (UK), montre que l’utilisation à long terme de cannabis ou de médicaments à base de cannabinoïdes peut nuire à la mémoire. Les chercheurs rappellent que l'usage intensif et régulier du cannabis augmente le risque de problèmes de santé mentale, dont la psychose et la schizophrénie. Cependant, les effets secondaires possibles à long terme de l'exposition aux cannabinoïdes restent mal compris et largement discutés.
L’équipe étudie chez l’animal, les effets d’un médicament cannabinoïde spécifique (nommé WIN 55,212-2) et constate que :
- les souris exposées à long terme au médicament présentent des troubles de la mémoire au point de ne plus pouvoir faire la distinction entre un objet familier et un nouvel objet ;
- l'imagerie cérébrale montre également que le médicament altère la fonction de zones cérébrales clés impliquées dans l'apprentissage et la mémoire ;
- de plus, l'exposition à long terme au médicament nuit à la capacité de ces zones cérébrales impliquées dans l'apprentissage et la mémoire à communiquer entre elles (cf visuel).
Le rapport bénéfice-risque en question ? L’exposition prolongée aux cannabinoïdes a un impact négatif sur la fonction cérébrale et la mémoire, concluent les chercheurs. Il est important de comprendre que les thérapies à base de cannabinoïdes ont non seulement des effets bénéfiques contre la maladie, mais aussi des effets secondaires négatifs. Une précédente étude de la même équipe avait en effet montré que l'exposition aiguë aux cannabinoïdes entraîne des déficits de mémoire, un effet qui peut être prévenu par l'utilisation d'un médicament de la famille de la caféine. Cela suggère aussi qu’il existe des stratégies pharmacologiques capables de réduire les effets secondaires cognitifs des thérapies à base de cannabinoïdes actuellement utilisées, qui se sont révélées efficaces contre plusieurs troubles du système nerveux.
Il est donc essentiel de comprendre ces mécanismes, non pas pour contester l’efficacité de ces thérapies, mais pour être en mesure de contrer leurs éventuels effets indésirables sur la mémoire et le cerveau.
Source: J Neurochem August, 2018 doi: 10.1111/jnc.14549 Chronic, intermittent treatment with a cannabinoid receptor agonist impairs recognition memory and brain network functional connectivity (Visuel Francisco Mouro, iMM/FMUL)
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