L'obésité est la priorité mondiale de Santé publique et l'utilisation des antidépresseurs est de plus en plus répandue. Cette démonstration d’une équipe du King's College London d’une association entre l'utilisation d'antidépresseurs et le gain de poids est donc très préoccupante. Ainsi, la hausse des prescriptions d'antidépresseurs pourrait contribuer à l’épidémie d'obésité. Ces données, présentées dans le British Medical Journal (BMJ) estiment à plus de 20% l’augmentation du risque de prise de poids, associée à la prise d’antidépresseurs.
L’étude montre également du doigt, un antidépresseur en particulier, la mirtazépine, prescrite aux personnes qui ne peuvent pas prendre d'autres antidépresseurs plus largement utilisés, car cet effet secondaire du médicament est déjà bien connu.
Les chercheurs du King's College et de l'Agence britannique des médicaments et des produits de santé ont mené cette étude de cohorte en analysant les données de santé de routine recueillies par les médecins généralistes en Angleterre. L’objectif était d’estimer l’association entre les prescriptions d'antidépresseurs dûment enregistrées dans les dossiers de santé électroniques et l'indice de masse corporelle (IMC) des patients. Les patients ont été regroupés en catégories de poids (normal : IMC 18,5 à 24,9- surpoids : IMC de 25 à 29,9 – obésité : IMC de 30 à 34,9- obésité sévère : IMC 35 à 35,9- obésité morbide : IMC de 40 à 44,9- obésité très morbide : IMC ≥45). Finalement les données de 314.450 participants assurant au total un minimum de 30.000 participants par groupe de poids, ont été prises en compte. Enfin, les chercheurs ont pris en compte les facteurs de confusion possible, dont l’IMC de départ, l’âge, le tabagisme, la prise d’autres traitements, les problèmes de santé…). L’analyse montre que :
- au cours de la première année de l'étude, le taux de participants sous antidépresseurs augmente avec chaque catégorie de poids, de 13% chez les participants à IMC normal à 26,5% chez les participants les plus obèses ;
- au cours du suivi de 10 ans, les participants ne prenant pas d’antidépresseurs s’avèrent moins susceptibles de prendre du poids à raison de 5% de leur poids corporel ou plus, avec une incidence de 8,1 par 100 années-personnes vs 11,2 par 100 années-personnes ;
- ces données conduisent à l’estimation d’une augmentation de 21% du risque de prise de poids, associée à la prise des antidépresseurs ;
- ce risque de prise de poids apparaît plus élevé au cours des 1 ou 2 premières années de prescription de l’antidépresseur ;
- au cours de la deuxième année de traitement antidépresseur, le risque de prise de poids est accru de 46,3%, vs le participants ne prenant pas d'antidépresseurs ;
- l’antidépresseur mirtazépine est associé au gain de poids le plus important.
Ainsi, la prescription et la prise de plus en plus répandue d’antidépresseurs pourrait contribuer à la prévalence croissante de l'obésité. Au niveau de chaque patient, cela suggère aussi que le risque de prise de poids soit bien pris en compte lors de la prescription.
Cependant, ici les chercheurs précisent qu’une partie des participants qui ont présenté un gain de poids associé à la prise d’antidépresseurs, durant le suivi de l’étude, était déjà obèse au début de l'étude.
Source : BMJ May 23 2018 DOI: 10.1136/bmj.k1951 Antidepressant utilisation and incidence of weight gain during 10 years’ follow-up: population based cohort study
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