Les adolescents qui ont été sévèrement intimidés pendant leur enfance présentent un risque plus élevé de pensées suicidaires et de troubles de la santé mentale, confirme cette étude de l’Université McGill, (Montréal). Alors que l'exposition à la victimisation par les pairs est relativement courante, que ce soit en face à face ou via la cyberintimidation, on en sait peu sur son évolution et son effet à terme sur le risque de maladies mentales. En identifiant des enfants victimes d’intimidation de 6 à 13 ans et en suivant leur santé mentale jusqu’à l'adolescence, les chercheurs québécois confirment que les adolescents les plus sévèrement victimisés présentent un risque accru de symptômes mentaux sévères, dont de pensées suicidaires.
La victimisation par les pairs est caractérisée par une conduite inappropriée vis-à-vis de la victime qui entraine un déséquilibre de pouvoir entre l'auteur et sa victime. La victimisation a déjà été documentée par de nombreuses études, et associée à un large éventail de symptômes d'intériorisation et de troubles de la santé mentale dès l'enfance et pendant l'adolescence.
Les chercheurs ajoutent à la preuve des effets néfastes de la victimisation chez l’enfant, en suivant jusqu’à l’âge de 15 ans 1.363 enfants, âgés de 6 à 13 ans à l’inclusion, participant à l'Étude longitudinale du développement des enfants du Québec. Ces jeunes participants ont été répartis selon 3 « trajectoires » de victimisation, faible ou modérée ou chronique, sévère et durable. Les chercheurs ont pris en compte les facteurs de confusion possibles dont le sexe, la santé mentale de départ, les difficultés familiales et le mode de victimisation. L’analyse montre que :
- environ 15% des enfants sont exposés aux niveaux de victimisation les plus sévères depuis le début de leur scolarité jusqu'à la transition au secondaire ;
- environ 59% des connaissent une victimisation par les pairs au cours des premières années de primaire, et cette victimisation décline au fur et à mesure que les enfants grandissaient.
- les enfants victimes de victimisation « modérée » ne courent pas de risque accru de problèmes de santé mentale ;
- les jeunes les plus gravement victimisés présentent, à 15 ans et vs les jeunes les moins victimisés, un risque :
- plus que multiplié par 2 (OR : 2,56) de symptômes dépressifs ou de l’humeur
- plus que multiplié par 3 d’anxiété généralisée (OR 3,27) ;
- plus que multiplié par 3 de pensées suicidaires (OR 3,46).
- L'association avec les pensées suicidaires reste significative après prise en compte des symptômes de dépression, de dysthymie et d'anxiété généralisée.
Ainsi cette étude, une des premières à prendre en compte le développement de la victimisation depuis la primaire jusqu'à la transition vers le secondaire confirme la victimisation comme un facteur majeur de mal-être, voire plus à l’adolescence, une période importante de développement des relations sociales. L’identification précoce de cette victimisation devrait inciter à des interventions de soutien et « anti-harcèlement », qui ont fait la preuve de leur efficacité, écrivent les auteurs, référence à l’appui.
Source: Canadian Medical Association Journal Jan 15, 2018 DOI: https://doi.org/10.1503/cmaj.170219 Childhood trajectories of peer victimization and prediction of mental health outcomes in midadolescence: a longitudinal population-based study
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