La fréquence et la sévérité croissantes des infections associées aux soins de santé (IAS) causées par la bactérie Clostridium difficile viennent d’être liées, avec cette étude du Baylor College of Medicine, à l’utilisation d’un additif alimentaire courant, un sucre : le tréhalose. L’équipe de Houston montre in vitro et in vivo, dans la revue Nature, comment le tréhalose augmente la virulence de ces lignées de C. difficile.
Les infections à C. difficile font partie des défis prioritaires à l’hôpital, en 15 ans, elles sont devenues la cause la plus fréquente d'infections nosocomiales dans les pays développés. Ainsi, C. difficile a causé près d'un demi-million d'infections en un an et 29 000 décès aux seuls Etats-Unis. La bactérie provoque une inflammation du côlon et une diarrhée qui peuvent être mortelles, en particulier chez les patients plus âgés. Certaines lignées de C. difficiles sont devenues plus virulentes, et alors que la plupart des infections se produisent chez des patients ayant reçu des soins et des antibiotiques, d’autres lignées sont devenues résistantes aux antibiotiques fluoroquinolones.
Le Dr Robert Britton, professeur de virologie moléculaire et de microbiologie et son équipe a découvert que les lignées de C. difficile « RT027 » et « RT078 » sont devenues plus récemment dominantes dans le monde et alors qu’elles n’étaient ni épidémiques ni hyper-virulentes dans les années 80, mais elles ont commencé à prédominer et à provoquer des épidémies majeures après 2000. L’équipe a donc cherché à comprendre les facteurs responsables de cette nouvelle virulence.
- Le premier facteur évoqué est le développement d’une résistance aux antibiotiques fluoroquinolones, cette résistance ayant contribué à la capacité de « RT027 » à provoquer des épidémies. Cependant, la résistance aux fluoroquinolones étant également caractéristique d'autres lignées de C. difficile non épidémiques, l’équipe a recherché d'autres facteurs pouvant aider RT027 et RT078 à accroître leur virulence.
- Le tréhalose, une nourriture de prédilection pour certaines bactéries : l’équipe a donc regardé les sources de nourriture préférées des souches RT027 et RT078 et a ainsi découvert que ces lignées peuvent croître à des niveaux de sucre tréhalose environ 1.000 fois inférieurs à ceux nécessaires à la croissance d'autres lignées. Pour relier la capacité de ces bactéries à métaboliser de faibles niveaux de tréhalose, les chercheurs ont travaillé sur un modèle murin d'infection à C. difficile. Les souris ont reçu une souche RT027 de C. difficile et un régime alimentaire avec, sans ou à faibles niveaux de tréhalose. Ils constatent que la virulence bactérienne est directement liée à ces niveaux de « sucre » : la mortalité était plus élevée dans le groupe ayant consommé du tréhalose. Cependant, ils montrent, par d’autres expériences, que l’augmentation de la sévérité de la maladie en présence de tréhalose ne s’explique pas par le nombre plus élevé de bactéries mais plutôt par une production par la bactérie RT027 de niveaux plus élevés de toxines.
Le tréhalose alimentaire, un facteur majeur de prédominance de certaines lignées de C. difficile : ces travaux suggèrent dans leur ensemble, que le tréhalose alimentaire a bien contribué à la prédominance de certaines lignées de C. difficile qui métabolisent plus facilement le tréhalose et augmentent ainsi leur production de toxines.
Le sucre tréhalose considéré comme un sucre parfaitement sûr pour la consommation humaine, « peut avoir des conséquences inattendues », concluent les chercheurs dans leur communiqué. Ils ajoutent : « Notre étude suggère que l'effet du tréhalose dans l'alimentation des patients dans les hôpitaux devrait être étudié plus avant ».
Source: Nature 3 Jan, 2018 doi:10.1038/nature25178 Dietary trehalose enhances virulence of epidemic Clostridium difficile (Visuel NIH)
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