Ce cri du cœur d’Isabelle Aubry, fondatrice et présidente de l’Association internationale des victimes de l’inceste, l’AIVI (1) a pour raison la loi sur ce crime que les députés français s’apprêtent à voter, sur proposition de Marie-Louise Fort. Que dit Isabelle Aubry ? Ecoutons-la, l’affaire est grave, pour elle et pour toutes les victimes de l’inceste : les survivants… Rappelons qu’une loi qualifiant l’inceste en tant que crime est une demande forte de l’AIVI.
Loi historique, car le mot inceste n’a pas été prononcé dans l’hémicycle depuis 1791, date à laquelle il a été supprimé du Code pénal.
Le premier volet de la loi concernant l’insertion de l’inceste dans le Code pénal satisfait partiellement les victimes. Si pour lutter contre un tabou, il faut commencer par le nommer, il ne faut pas oublier l’aspect technique de notre demande.
D’abord, nous voulions en finir avec les correctionnalisations à outrance, en créant un crime spécifique d’inceste. Demain comme aujourd’hui, entre le viol incestueux et les agressions incestueuses, les juges, procureurs et avocats, pourront toujours rétrograder un viol d’enfant de la Cour d’assises à la Chambre correctionnelle. Plus rapide, moins onéreuse, cette technique de la déqualification fait de la société la complice de l’agresseur, en minimisant son crime et sa peine. Quel sens peut avoir une sentence d’un an avec sursis pour avoir violé son enfant pendant des années ?
Mais Rachida Dati nous l’a dit en face : « Il faut absolument garder cette souplesse de notre justice que même les victimes et associations réclament car cela va plus vite à juger ». Transgresser la Loi au détriment des victimes, voilà ce que propose notre Garde des Sceaux du haut de son 29e rang européen en matière de justice. Intolérable !
Pourquoi ne pas intégrer l’inceste comme un crime spécifique, comme au Canada ? Question d’argent tout simplement. Il faudrait multiplier le nombre de Cours d’assises par dix si ce n’est plus. Notre gouvernement n’est pas prêt à celà, les banques passent d’abord. Si c’est ainsi pour l’inceste, gageons qu’il en va de même pour toutes les affaires.
Ce qui nous convient ? La prise en compte des collatéraux (tantes, oncles, frères, sœurs…) dans l’inceste et, enfin, la suppression de la notion de contrainte sur l’enfant. Nous regrettons que les cousins ne soient pas intégrés car ils sont tout autant prédateurs que les autres.
Bien sûr, nous saluons les propositions de formation, prévention, information et création de centres pluridisciplinaires départementaux. Cela répond à une immense attente. Ce qui serait nécessaire en plus ? Un budget pour la recherche car sans recherche comment former et comment soigner ?
Nous espérons surtout que cette loi sera la première pierre d’un édifice destiné à protéger nos enfants de l’inceste. Deux millions de français, autants de conjoints ou d’enfants, de parents proches, d’amis, tous concernés, cela fait du monde, cela fait un fléau de santé publique – car tous en souffrent.
Auteur Isabelle Aubry, mis en ligne par Jean-Marie Manus Lire aussi : INCESTE : L’AIVI LE VOULAIT, UN CRIME SPECIFIQUE inscrit au code pénal ?
(1) AIVI. 20, rue Edouard Pailleron 75019 Paris http://aivi.org et http://aivi.org/congres. Le prochain congrès aura lieu à Paris le 3 octobre 2009, sur le thème « Etre parent après l’inceste ».
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