Jacques Lansac, président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOG), et Marc-Alain Rozan, président du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (SYNGOF), estiment que le reproche de la Fédération Hospitalière de France (FHF) « d’augmenter le taux de césariennes par mercantilisme » (sic) n’est pas honnête si on n’évoque pas en même temps les données d’autres pays et les raisons de l’augmentation : 10,1 % en 1981 à 20,1 % en 2005.
Or ce dernier taux est comparable avec d’autres : 21 % en Angleterre et en Irlande, 20 % au Danemark…, inférieur à d’autres : 26 % en Allemagne, 29 % en Espagne et aux Etats-Unis, 36 % en Italie, certains pays ayant des taux plus bas : autour de 16 %.en Suède, Norvège, Pays-Bas. Il faut voir, disent les deux représentants des gynécologues obstétriciens, la contrepartie : la baisse de la mortalité maternelle et néonatale. Alors pourquoi ce chiffre français ? Pour au moins 6 raisons.
1. Un premier accouchement plus tardif : plus d’accouchements après 40 ans qu’avant 20 ans en 2008.
2. Plus de naissances multiples : la gémellité augmente avec l’âge des femmes, avec l’assistance médicale à la procréation (2,5 % des naissances), d’où mise en garde des spécialistes aux couples sur la baisse de fertilité avec l’âge.
3. Pratique de la césarienne pour des présentations autrefois non césarisées, telle la présentation du siège, soit 4 % en plus.
4. Augmentation des utérus cicatriciels post-césarienne à la 1ère grossesse, d’où… 50 % de césariennes à la 2e, 100 % à la 3e.
5. Demande du couple, refus de la voie naturelle, la césarienne semble plus sûre pour la mère et l’enfant.
6. Prudence de l’accoucheur face à un risque possible : gros enfant, bassin étroit, prématuré, jumeaux. Ainsi on ne lui reprochera pas devant les juges les conséquences éventuelles d’un accouchement difficile.
Bref, si l’on n’étudie pas aussi les caractéristiques sanitaires, obstétricales des patientes, ni le niveau du plateau technique des établissements, on ne peut mettre en cause un taux de césariennes. Un point de technique important est ici souligné par les deux représentants : « Bien sûr, le taux de césariennes est plus élevé dans les établissements dits de niveau 3, où se trouvent les grossesses à risque, que dans les maternités de niveaux 1, où, en principe, ne se trouvent que des grossesses à bas risque. Mais, là encore, il faut tenir compte des conditions d’exercice (isolement, présence intermittente d’un anesthésiste affecté à plusieurs disciplines, d’un pédiatre, d’un remplaçant) : elles peuvent modifier les pratiques ».
Quant à l’accusation de mercantilisme dans les propos de la FHF, « il est inexact et malveillant de dire que les césariennes sont pratiquées pour améliorer le revenu des médecins, puisque le tarif, fixé par la Sécurité Sociale, est le même pour l’accouchement par voie basse et pour la césarienne : 313 euros. Ce tarif est même ridiculement bas pour un acte qui met en jeu la vie de la mère et de son enfant et qui doit être couvert par une assurance professionnelle de 30 000 euros par an ! ». La FHF a-t-elle parlé trop vite ?
D’où recommandations du CNGOF et le SYNGOF :
– limiter le taux de césariennes : d’où nécessité de bien poser leurs indications, selon les Recommandations de bonne pratique clinique réalisées avec la HAS en 2000 ;
– évaluer la pratique de chaque praticien ou équipe à partir des données du réseau sentinelle de maternité AUDIPOG (www.audipog.net), qui, pour les primipares à bas risque, annonce 14 % de césariennes ;
– publication des taux comparatifs entre établissements d’une même région pour harmoniser les pratiques.
Deux messages pour finir : aux couples : « l’accouchement par voie basse est naturel et présente moins de risques pour la maman et son bébé que la césarienne, qui est une opération chirurgicale » ; aux directeurs d’hôpitaux : « ne pas trop jeter l’opprobre sur une corporation à haut risque médico-légal…, plutôt les encourager et leur faciliter la tâche au quotidien : l’absence de gynécologues-obstétriciens bien formés risque d’être bien pire qu’un taux de césariennes en augmentation »…
Joindre les deux représentants ? Jacques Lansac au 06.08.43.23.48, Marc-Alain Rozan au 06.64.43.49.24.
Auteur : Jean-Marie Manus
Lire également : MATERNITES en moins, CESARIENNES de plus en plus
Laisser un commentaire