Aujourd’hui l’immunonutrition est devenue très à la mode sur les sites grands publics. Elle permettrait de guérir de tous les maux et même ralentirait le vieillissement qui jusqu’alors paraissait inéluctable. Faisons le point, au jour des connaissances actuelles.
Lorsque nous tapons « immunonutrition » sur un moteur de recherche nous découvrons moult sites qui nous promettent, à raison d’ingurgiter les pilules aux prix prohibitifs, monts et merveilles en nous protégeant du stress oxydatif. Nous pouvons également trouver d’autres sites qui nous proposeront un « test d’immunonutrition » pour la modique somme de 500 euros afin d’étudier notre « sensibilité » vis à vis de « presque 300 nutriments et aliments ». Suite à quoi une interprétation de cette dernière permettrait de nous guider dans l’établissement de votre nutrition en fonction de nos « intolérances ou allergies alimentaires », grâce à un coaching… Nous nourrir en fonction de notre « immunité spécifique » nous éviterait alors « une inflammation chronique » et nous permettrait ainsi « d’augmenter notre bien être, nos performances psychologiques, intellectuelles ou sportives, maîtriser notre poids, optimiser notre vieillissement et notre longévité » (sic). N’ayant pas peur d’en faire trop, ils nous promettent également que cette alimentation adaptée à votre immunité « aiderait à la guérison de pathologies rhumatismales, cardiovasculaires, digestives, psychiatriques, allergiques, migraineuses et de bien d’autres encore. » Vous l’aurez compris tout comme moi, ces sites profitent de la crédulité des gens en utilisant un langage ésotérique afin de pouvoir les abuser et les escroquer.
Pourtant de nombreux travaux existent sur l’association entre déficit en micronutriments et altération de la réponse immunitaire, notamment chez la personne âgée (cf. « Prévention de l’Immunosénescence : l’approche nutritionnelle », By A Larbi, B Lesourd, T Fulop, In Age & Nutrition 2008 – Volume 19, n°1). Mais les études, validées cliniquement, qui existent concernant l’utilisation de supplémentation pour corriger ces déficits laissent apparaître des résultats qui ne sont que trop ténus.
Par contre, dans un autre domaine que le préventif, sont utilisés en milieu hospitalier des mélanges nutritifs polymériques hyperprotidiques et hypercaloriques enrichis en « immunonutriments » : arginine, nucléotides, acides gras omega 3 (EPA et DHA) sous forme de compléments nutritionnels oraux) ou de nutrition entérale. C’est le cas par exemple d’Impact®. Ce produit a été développé par Novartis Nutrition® et racheté par Nestlé Nutrition®. L’HAS a d’ailleurs donné un avis favorable concernant son utilisation. Il est préconisé en nutrition péri-opératoire pour des patients ayant une chirurgie digestive carcinologique majeure programmée :
- en préopératoire, chez tous ces patients quel que soit l’état nutritionnel ;
- en postopératoire, chez les patients dénutris.
Les diètes à visée immunomodulatrice, nommées « immune enhancing diets » (IED) par les Anglo-Saxons sont bien documentées. Vous pouvez vous référer par exemple à : « Immunonutrition », By J.F. Zazzo, In Conférences d’actualisation 2001, p. 799-814. Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS et Sfar, ou plus récemment « Importance du support nutritionnel dans les cancers digestifs », By P. Senesse, R. Altwegg, L. Vercambre, E. Assenat, In Oncologie (2008) 10: 197–201.
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Merci aux différentes personnes qui par leurs conseils ou expériences ont contribué à l’élaboration de ce post : Pr Bruno Lesourd (CHU de Clermont-Ferrand), Dr Marie-Claude Bertière (du CERIN), Dr Virginie Colomb (CHU Necker – Enfants Malades), Sylvie Planchaud (diététicienne au CHRU de Tours), Sandra Bouyer (diététicienne au CHU de Poitiers).
BLOGGER : Pierre Pérochon, diététicien